samedi 30 novembre 2013

Sucre - Tarija 28/11 - 30/11

 Réveil à Sucre, cité coloniale, capitale constitutionnelle bolivienne.


Petite ballade au hasard des rues...



...et tour de marché!


les étales sont bien achalandées!


les fruits sont magnifiques...


et dans chaque recoin du marché, une spécialité...




le coin jus de fruits frais!



les pommes de terre...


les gelées qui ne me donnent pas du tout envie...


boucheries...


les oeufs calibrés proche des laitages



les gateaux trops colorés


les sachets d'haricots, fèves, maïs....


les avocats!!!!! hmmmmm!!!



et le coin restauration où j'aime me poser pour y manger au milieu des locaux


 

Très beau marché, plein choses à vendre...mais pas de traces de charrango. Le charrango est un petit instrument andin, à cordes, dont la caisse de résonnance était faite avant en carapace de tatou. J'étais à deux doigts de m'en acheter un lors de mon voyage nord argentin, en zone andine proche de la frontière bolivienne,  il y a quelques années....mais ne voulant pas m'encombrer pour le reste du voyage, je ne l'avais pas acheté et je l'ai longtemps regretté. Etant en Bolivie, une des régions du charrango et en plus très bon marché, je me dois d'en trouver un, et rapidement car je vais bientot passer au Chili!

Je me renseigne donc dans le Routard, et auprès des gens....j'en vois à tous les prix et qualités... je vais cheminer la ville en fonction des indications que l'on me donnent...je finis par en acheter un beau, dans une toute petite boutique de musique! 

Fatigué mais content d'avoir enfin mon "charrangito", je récupère mon sac pour aller à la gare, prendre un bus pour Tarija où j'arriverais le lendemain matin.

De bon matin, je dois trouver où me reposer après cette nuit de voyage. C'est vite chose faite dans une petite auberge. Un peu de repos et je suis en quète d'un petit dèj! Je me pose en terrasse sur la place centrale. C'est calme et le climat est super doux! Je lézarde donc et  réfléchis à la suite du voyage...je peux rester jusqu'au lendemain ici..j'ai le temps de me poser un peu.

Journée calme donc à me promener, aller sur internet et aviser Melina, couchsurfeuse de Tarija, de mon arrivée. Rendez vous fixer en soirée! Cool!

Elle passe me prendre avec ses amis. Proposition: aller dans un bar typique, avec musique et danse! Parfait!
Le lieu est bien rempli, clients atablés, ambiance festive, musiciens et couple de danseurs. Ici, on boit du "singani". A Tarija on fait du vin et cette eau-de-vie de raisin, équivalent donc du Pisco péruvien. La soirée sera donc bien bien arrosée ....nous allons rester quelques heures au rythme de la "cueca". La cueca est une danse que je connaisais comme traditionnelle chilienne. J'aime entendre ces rythmes qui me rappelent mes amis chiliens que je vais bientot retrouver!

Le lendemain, c'est "resaca" méritée! J'ai mal au crane!!!! Du coup, moi qui pensait me balader un peu, c'est pas gagner! Ca va etre repos et préparation pour le prochain trajet nocturne pour Tupiza où je vais arriver à 2.30. J'ai réservé une chambre pour aller me coucher quelques heures.....et me lever à 7.30 pour débuter une excursion de 4 jours dans le Sud Lipez et le Salar d'Uyuni! Hate de découvrir ce lieu désertique d'altitude connu pour ces splendides paysages!

mercredi 27 novembre 2013

Potosi 25/11 - 27/11

Je quitte Oruro pour Potosi. Je vais effectuer ce voyage au coté d'une petite fille. Ce sera un échange de regards, d'observation, de sourires,de cache-cache pendant un moment. Elle est drôle et souriante, avec des bonnes joues, rougies voir brûlées par le soleil, typique de ces altitudes.


Une fois à Potosi, je vais à l’hôtel où je dois retrouver Kari et Javier. Pas de traces d'eux à la réception....je vais un peu me promener. A mon retour, je retrouve Nati! Déçue de son périple, elle a accéléré vers le sud!
Je retrouve finalement mes deux compagnons du Machu Picchu et nous allons dîner tous ensemble avec Nati! C'est amusant et sympa de les retrouver ici!

Potosi c'est toute une histoire! En espagnol, une expression dit "vale un potosi", "ça vaut un potosi", qui équivaut à l’expression en français "c'est (pas) le Pérou". Potosi a été fondé pour exploiter la mine il y a plus de 500 ans, et appartenait originellement à la région du haut-Pérou (doù l'expression française).

Mon livre de route de ce voyage est "les veines ouvertes de l’Amérique latine" d'Eduardo Galeano. Ce livre référence raconte la non-découverte du continent et les pillages qui suivirent par les puissances européennes et nord-américaines.

Potosi était LA mine de l’époque. Au 17e siècle, la ville était une des plus grande du monde, plus grande que Paris! On y extrayait de l'argent, qui permis notamment le développement des empires européens. Depuis ce temps, les montagnes environnantes n'ont cessées d’être trouées de partout pour y extraire des minerais précieux.

J'avais décidé d'y passer pour voir ce que un tel saccage de plusieurs siècles pouvait donner sur les plans sociaux, environnementaux et économiques.

Qu'y a-t-il à faire à Potosi? Visite de la ville coloniale et forcément visite d'une mine en activité!

Je savais que ces visites étaient proposées aux touristes. Payer pour aller voir des gens se tuer au boulot!!!! C'est possible ça? Je m'étais dit que je n'irais pas! Et puis, en apprenant que les mineurs géraient les visites, et que ces visites sont un complément de revenus pour les mineurs, je décide d'aller voir les entrailles de ces montagnes qui ont fondées ces empires coloniaux!

Je vais faire la visite avec Kari et Javier.

Une fois notre guide-ancien mineur retrouvé, nous allons nous équipé: bleu de travail, bottes et casque.


Ensuite, nous stoppons au marché des mineurs où se trouvent les boutiques vendant tout le nécessaire du mineur, et aussi tout ce que les touristes peuvent leurs descendre et offrir: boissons, feuilles de coca, alcool à 96%!! et bâtons de dynamites. Pas trop fan des explosifs, je vais prendre du soda et des feuilles de coca.

Une fois tous bien chargés, nous allons visiter une petite entreprise où sont les traitées les roches extraites.

Les roches sont broyées afin de devenir poussières.


Des paillettes d'argent sont déjà visibles.


Pour récupérer cet argent, on ajout de cyanure. J’imagine que les eaux ne sont pas traitées correctement et doivent polluées toutes les eaux du coin et cela depuis quelques siècles...!


J'interroge notre guide sur la nationalisation des mines. Effectivement, le président Evo Morales a tout nationaliser. 

Les mineurs sont organisés en coopératives. Ils sont auto-entrepreneurs. Ce statut leur permet d'échapper en quelque sorte au droit du travail... ils travaillent autant d'heures qu'ils le souhaitent, ou plutôt selon leurs besoins! Le travail est autorisé à partir de 18 ans ou 10 ans avec l'accord des parents...Concrètement , les enfants descendent à la mine pendant les vacances scolaires pour améliorer les revenus familiaux.


Ensuite, direction l'entrée la mine! J’appréhende un peu...


Rapidement, on nous nontre les minerais si recherchés scintillants dans la roche.


Pas loin de l'entrée se trouve "El Tio" à qui des offrandes sont faites pour qu'ils veille sur les mineurs...Les espagnols appelaient ce personnage "el diablo", le diable..pas étonnant, les croyances autochtones n'ont pas leur place encore une fois!


Pendant 2 heures, nous allons progresser dans ce dédale sous-terrain. C'est terrible! Il faut marcher à la lumière de la frontale, en se cognant, progressant accroupi parfois, sur un sol humide et glissant. Lorsqu'un wagon arrive, il faut vite rebrousser chemin pour trouver un "espace" où se coller contre la paroi pour laisser passer le wagon chargés poussés par les mineurs.
L'air est poussiéreux, soufré. Chaleur suffocante. Absence d'air. La mine est à 4000 mètres d'altitude!
Comment est ce possible de travailler ici dans ces conditions? Nous fatiguons juste à nous déplacer!
Les gars se déplacent parfois avec des sacs de 30 kg d'explosifs sur le dos, progressant accroupis, c'est dingue!
Parfois, résonnent des explosions! C'est angoissant d’être enterré ici!
Nous allons descendre jusqu'au 2 ème niveau.
Rencontres et discussions avec les mineurs à qui nous laissons les victuailles bien méritées. Ils restent plus de 10 heures sans remonter et sans manger. La mastication des feuilles de coca les aident un peu.
Nous allons chacun notre tour, pelleter un peu, aider à vider les bacs dans les wagons...c'est du délire!
En remontant, nous croisons aussi des femmes. Pas d'enfants.


Notre guide nous annonce 29 morts l'année passée. Les accidents sont nombreux. Les mineurs souffrent de maladies pulmonaires. Comment aujourd'hui cela est il encore possible!? Le Routard disait que cette "visite" c'était Germinal en direct...on y est bien je crois!

Je repense à l'histoire de ce continent, de cette ville, de cette montagne 'Cerro Rico", "la montagne riche". Voilà plus d'un demi millénaire que les empires coloniaux/néo-coloniaux font perforés cette montagne. 7 à 8 millions d'esclaves indigènes puis africains (amenés pour combler les pertes!) morts pendant l'époque coloniale! Et aujourd'hui les conditions de travail sont celle d'un autre siècle et les mineurs et leurs familles survivent ici. Tels est le lourd prix à payer des populations pour que dans les pays riches notre confort soit. Toutes ces ordures de gouvernement, de financiers, de dirigeants mériteraient bien de rester enterrés ici! Un dégoût profond m’envahit. Dur à exprimer.
 
Les filons de minerais se font rares...la montagne est de plus en plus  trouée, ce qui la fragilise et provoque de nouveaux effondrements. Dans 2 à 5 ans se sera fini. La mine va fermer.

Que va t il se passer alors ici à Potosi!? Morales a promis un développement touristique pour compenser. Les mineurs n'y croient pas. Certains s'en vont déjà travailler dans les mines du nord chilien.

Moi, je me dis que c'est l'annonce d'un drame social! Quelle est encore la situation aujourd'hui dans le nord de la France, ancienne région minière ou au Pays de Galles après la fermeture des mines? Et la Bolivie n'est pas riche comme ces pays...


Tous marqués par la visite je pense, nous rentrons à l’hôtel pour une bonne douche. Dernier repas tous ensemble bien sympa sachant que le lendemain nos chemins se séparent à nouveau. Kari et Javier, accompagné de Nati vont vers le salar d'Uyuni. Moi j'hésite à les suivre, mais j'ai prévu faire Sucre avant...


Nous faisons une visite de la ville ensemble "à la japonaise"! Je me spécialise dans les balcons et Kari, lui c'est les portes! Traces de l'époque coloniale.








Je quitte mes compagnons. On espère se retrouver en Écosse, en Suisse, en France ou ailleurs! Je vais ensuite visiter la "Casa de la Moneda". Ici, étaient frappés la monnaie des Amériques, où se tuaient à la taches des esclaves africains.


Avant mon départ pour Sucre, je mange dans un petit resto où je trouve une des spécialité: k'arapulca, c'est une soupe épaisse à la farine de maïs dans laquelle on immerge une pierre chaude pour garder à température!


lundi 25 novembre 2013

La Paz - Oruro 22/11 - 25/11


Avec Nati nous arrivons de Copacabana à La Paz bien fatigués par la marche de la journée, la route, les bouchons et le retard...il est 22h et il nous faut trouver où dormir! Je bouquine le routard pour tenter de trouver rapidement! 

Nous sommes pressés de nous poser et d'aller manger! La ville est polluée et bruyante! On ne peut pas dire qu'elle porte bien son nom cette ville! (la Paz veut dire la paix) Nous arpentons les rues avec nos gros sacs....c 'est bien d'être deux à ce moment là pour se motiver...je sens que Nati en a marre et moi aussi! Le premier hôtel visité est vraiment pas terrible. En même temps, nous sommes usés et chacun évoque déjà l'envie de partir de La Paz le lendemain....alors nous restons dans cet hôtel un peu glauque et allons chercher à manger. Il est alors plus de 23h....pas grand chose encore ouvert! Après avoir tourner un moment, nous finirons dans un pub anglais à manger des plats indiens. Pendant le repas, chacun réfléchit au plan du lendemain. Moi je veux partir mais je ne sais pas où....je pensais me poser un peu et regarder vers où aller selon le temps qu'il me reste en voyage...j'avais vu qu'il y avait de superbes randos à faire pas trop de loin de la capitale, mais je ne sais pas si la neige n'a pas déjà rendu les sentiers inaccessibles....au nord-est, pas loin se trouve le village de Coroico. Là vivent les descendants noirs des esclaves, avec un préservation de leurs cultures et c'est une zone tropicale riche en fruits...Nati est aussi tentée par ce lieu....ou alors je peux continuer ma route vers le sud...

Le lendemain matin, nous étudions chacun notre plan de voyage.....moi, je fais le point sur le temps qu'il me reste, sur le temps que je veux être au Chili avec les amis...je me fais un planning grossier en partant de ma date de retour en France...je n'ai plus beaucoup de temps! Ca passe trop vite! Soit je vais un peu vers le nord ou l'est et alors je vais devoir courir jusqu'à la fin du voyage ou alors je vais vers le sud, verrais moins de choses mais je serais plus tranquille et pourrais laisser la place aux imprévus! Je choisi la deuxième option! Nati, elle s'en va à Coroico.

Après avoir fait un petit tour dans le centre, au marché, dans les boutiques de musique et au musée de la musique fermé malheureusement, je vais au terminal de bus. Direction Oruro situé à mi-chemin vers Potosi. A priori, à Oruro, ville minière, rien de particulier à y faire, mais j'ai envie d'y tenter une étape. Dans le pire des cas, demain je peux être à Potosi.

En sortant de la ville de la Paz, je peux m'apercevoir de la disposition de la ville. La Paz s'étale entre 3200 et 4000 mètres d'altitude dans un canyon, entouré de très hauts sommets. Les riches sont au centre, situé en bas de la ville, plus on monte vers l'extérieur et plus les quartiers sont pauvres.
 

Pour aller à Oruro, il n'y a que 4 heures de bus. C'est agréable un petit trajet pour une fois! Le bus traverse un grand plateau d'altitude, bordé par la cordillère.




 A l'entrée de la ville d'Oruro, j'aperçois un monument: c'est un énorme casque de mineur. Le ton est donné.

Je me pose dans un hotel proche du terminal de bus. Je n'ai pas le courage de chercher longtemps. 

Le lendemain, j'ai des nouvelles de Javier et Kari, mes amis avec qui je suis allé au Machu Pichu. Nous devrions nous retrouver à Potosi deux jours après! C'est cool! Le rendez vous est pris dans une auberge.

Je vais ensuite me promener vers le centre ville. Je traverse le marché et en arrivant sur la place m'aperçois qu'une fête est en préparation. Je suis bien tombé!

Des fanfares se relayent devant l'église. Des groupes femmes en costume se préparent.





Juste à coté, je vois un monument composé de statues. C'est vraisemblablement un hommage à une révolte de mineurs.

























 Vu la chaleur, je vais me boire un bon jus de fruit frais. Je vais y rencontrer Giovanna, une trentenaire souriante et qui a envie d'échanger tout comme moi. Très vite nous partons dans des discussions sur la fête. Elle m'explique que Oruro est connu pour son grand carnaval et régulièrement il a y des défilés ainsi. Je l'interroge aussi sur les mines. Elles sont toujours en activité et c'est l’activité principale ici.


Nous allons assistés au défilé des différents groupes de musiciens et de danseuses.






Gionanna m'indique qu'il y a un musée de la mine à coté. Allons-y! C'est assez étrange....l'entrée de la mine se fait depuis l'intérieur de l'église! Je vais pour acheter les billets...il y a un prix pour les boliviens et un prix pour les touristes....pour plaisanter, je dis que je suis péruvien....pour payer le prix des locaux....sauf que je n'ai pas encore réaliser que je suis en Bolivie! Il est drôle le touriste! Mais, je ne sais pas pourquoi, je me rends compte ensuite que j'ai payer le même prix que les locaux finalement! Mystère!

En descendant dans cette mine, je pense à mon grand-père. Parmis ses différents métier, il me semble bien qu'il a travaillé à la mine.

Dans la mine se trouve "El tio". Les mineurs lui faisait des offrandes pour les protéger. Dans le musée, quelques outils, vieilles machines, schémas, explications...le tour est vite fait.


Je vais ensuite passer du temps avec Giovanna. Le courant passe bien, les discussions vont bon train et elle très agréable. Chacun se sent en confiance. C'est assez drole comment on peut arriver à parler de choses personnelles avec une personne inconnue!

Chacun finit par se dévoiler un peu à l'autre...et puis un peu plus.... C'est ainsi que je vais connaitre la vie de cette femme. Écouter Giovana m'a bouleversé. Il y a des rencontres qui marquent, qui émeuvent, qui chamboulent, auxquelles on repense lorsque l'on traverse des moments chouettes ou on contraire difficiles. Cette rencontre avec elle fait partie de ces rencontres importantes.

J'ai hésité à parler ici de la vie de cette femme. Je choisi de le faire car cela fait parti de mon voyage et raconter une partie de  sa vie, c'est témoigner d'une réalité de ce pays, d'une réalité de ce monde.

Giovanna a la trentaine et est originaire d'Oruro. Ses parents ont eu quatre enfants. Elle est la deuxième. De toute la famille, elle est la seule "morena", c'est à dire la seule brune, typée indienne. Au sein même de sa famille, elle sera victime de racisme, elle sera mal vue et mal traitée. 

Son père battait sa mère. Son grand frère timide et effacé ne disait rien. Giovanna fasse à cette injustice, petite déjà dotée d'une force de caractère, fait face à son père pour défendre sa mère. Elle se souvient voir sa mère jetée dans les escaliers.

Lorqu'elle a huit ans, ses parents décident d'aller vivre à La Paz. Ils reviendront rapidement à Oruro, mais laissent Giovanna chez une tante. Dans cette famille d'accueil, elle y sera maltraitée, battue par sa tante et ses cousines. Elle y travaille comme une esclave, obligée de se lever tous les jours à 3h pour travailler avant d'aller à l'école. Elle va endurer ce traitement jusqu'au jour où à bout elle réclame à ses parents de la reprendre. C'est ce qu'ils feront.

Plus tard, elle rencontre un péruvien avec qui elle souhaite faire sa vie. Le racisme de la famille ne le permettra pas. Elle devra choisir entre suivre son copain qui rentre au Pérou et perdre sa famille, ou perdre son futur mari et garder la famille. Elle est restée avec ses parents.

Elle rencontre plus tard un autre gars. Ils prévoient se marier. Tout se passe bien. Giovanna est enceinte de lui. Mais juste avant le mariage, elle tombe sur son futur mari avec sa soeur. C'est un choc! Giovanna refuse le mariage. Elle pense tout d'abord tout quitter et s'enfuir en Espagne. Elle décide finalement de rester et d'affronter la situation la tête haute! Elle n'a rien à se reprocher. Elle reste! Elle donne naissance à sa petite fille. La famille va lui mettre la pression pour qu'elle se marie avec le père. La petite fille doit porter le nom de son père,  ils doivent se marier. Elle refuse, ce qui lui vaudra d’être mise à la rue avec son bébé. Elle y restera quelques jours avant de revenir dans la famille. Aujourd'hui encore, elle vit chez ses parents avec sa sœur. Elle ne les juge pas ni personne d'ailleurs. Pour elle, chacun reste avec sa conscience et dieu jugera.

Giovanna est très croyante. C'est sans doute ce qui lui permet de continuer avec cette force aujourd’hui. Elle voulait être religieuse, mais les parents ont refusés. Les filles des couvents, ce sont les filles violées, il faut pas entacher l'image de la famille. Elle voulut ensuite être militaire. Non plus! C'est réservé aux hommes! Elle finira pas se financer seule de études d'ingénieur civil, ces études n'étant pas approuvées par les parents. La vie l'a amené à se débrouiller très vite et à faire plein de métiers. Elle peut donc travailler dans la maçonnerie, la cuisine, l’électricité, la plomberie, fabrication de glaces, conseils économiques, administration, gestion,... Pour elle, il n'y a pas de travaux réservés aux hommes et aux femmes.

Malgré les coups durs de la vie, elle avance avec force et fierté. Elle avance ambitieuse mais sans écraser personne. Au contraire, elle aide de tous les cotés. Elle s'occupe des enfants du quartiers et de vieux abandonnés et esseulés. Elle a travaillé dans l'administration publique. Elle s'occupait des problèmes de remboursements. Elle devait exiger l'argent manquant aux particuliers. Elle procède avec patience, gentillesse et compréhension. Jamais elle ne va à la confrontation. Toujours elle se préoccupe d'abord des raisons du problèmes. Souvent, les besoins vitaux pour la famille sont en jeu. Elle le comprend, discute et parvient à des consensus. Son caractère, lui permettant d'obtenir des résultats du point de vue de l'administration, lui a valu de se faire offrir un poste de fonctionnaire après quelques mois. Beaucoup attendent des années pour l'obtenir. Des nombreuses jalousies apparaissent. Ne voulant pas de conflit, elle arrête ce travail sans discuter.

Giovanna sort très peu et encore moins dans le cadre du travail. Ces sorties sont accompagnées d'alcool. Les hommes, mariés ou pas, très souvent harcèlent et font des avances aux femmes. Ne pas y aller, c'est ne pas avoir de problèmes avec ces hommes.

Sa fille a 4 ans. Elle est très mature et prend soin de sa mère. Elle a déjà compris beaucoup de choses. Elle incite sa mère à sortir pour qu'elle rencontre quelqu'un et qu'elle soit heureuse. Sa fille aussi subit le mauvais oeil de la famille. Par exemple, on lui interdit de jouer avec les jouets de la cousine sous prétexte qu'elle les abimerait....on lui donne les vieux jouets cassés. Cette petite confrontée déjà l'injustice aimerait aussi pouvoir toucher ces beaux jouets et en avoir. Mais elle a aussi bien compris les difficultés de sa mère et n'exige jamais rien. Giovanna est émue lorsqu’elle me parle d'elle. Elle aimerait éviter que sa fille à son tour subisse cela. Lorsque je l'écoute parler d'elle et de ce que sa petite fille a déjà compris de la vie, j'ai l'impression qu'elle et sa fille ont atteint de la même manière une maturité prématurée.

Les boliviennes sont très souvent maltraitées. Les enfants aussi. De nombreux cas de viols infantiles existent. Giovanna a déjà évoqué le sujet à sa fille de 4 ans: "si un homme te touche, tu cries très fort!".

Le président actuel, Morales, originaire d'Oruro d'ailleurs, organise des conseils de femmes. Giovanna a été sollicitée, (ce qui ne m'étonne pas du tout!). Elle a refusé. Elle dit qu'il mène un double jeu, notamment avec les trafiquants de drogues. Et elle ne veut pas faire de politique, elle agit aux quotidien de son coté à sa manière.

Le père de la petite fille, qui ne l'a pas reconnue d'ailleurs, s'est marié puis à divorcé....la famille du gars revient encore à la charge pour que le mariage ai lieu. Peine perdue évidemment!

Une grande statue de la vierge surplombe la ville d'Oruro. Giovanna a participé à sa construction. Encore une compétence de plus. Elle en a fait une autre à Potosi. On lui a offert de partir au Chili pour d'autres projets de statues. Elle a refusée. Ce travail qu'elle aime, implique de travailler avec des produits toxiques, sans protection pouvant rendre stérile et elle espère avoir d'autres enfants. Elle me raconte comme elle avait travaillé avec une femme enceinte. Elle avait informé cette femme de la dangerosité des produit pour son bébé et avait luttter pour obtenir des protections. Elle n'aura aucun remerciement, mais j'ai bien compris qu'elle n'attendait pas de retour. 

Voilà de manière décousue, des bouts de la vie de cette femme que j'ai retenu. Je l'ai écouté avec plaisir et touché. Jamais je n'ai rencontré une femme ayant subi tant d'injustices mais continuant de vivre pleinement avec force. Elle est si généreuse, humble, simple, souriante, intelligente et  courageuse.

J'ai une pensée émue pour elle écrivant cet article. 

Merci Giovanna pour cette belle rencontre et je te souhaite tout plein de bonheur avec ta fille et que tu reçoives à ton tour autant que ce que tu offres aux autres!